Il venait d'avoir un A. Aussi fou que cela puisse semblait être, il s'agissait d'une note qu'il n'obtenait jamais en mathématiques. Ses parents lui avaient déjà fait remarqué que ce n'était pas comme ça qu'il allait hérité de l'entreprise familiale et lui et bien.. Il tenait à réellement les rendre fier. Non que l'entreprise soit le but de sa vie, bien sûr. Pour l'heure, en tout cas, il était évident pour le jeune homme qu'il venait de faire une belle progression et, son examen en main, il courrait dans les couloirs pour s'empresser de montrer sa note à ses parents. Il était persuadé qu'ils seraient fiers de lui. Il n'avait pas beaucoup l'occasion de leurs donner l'occasion d'être fier de lui. Il gagnait des championnats de boxe mais pour eux, ce n'était pas assez bien, il avait des notes moyennes et ils passaient leurs temps à le lui reprocher. Pour une fois qu'il se donnait à fond quelque part et que ça finissait par payer, il n'allait pas rater l'occasion de le crier sur tous les toits. Il se moquait de ses camarades de classe, qui tentèrent de le retenir, en criant son nom dans son dos. Il grimpa aussi vite que possible dans sa voiture et il fila comme une fusée. Il venait d'avoir seize ans et dans sa tête, il était encore un peu trop un enfant. Il avait du mal à grandir, puisqu'il ne le voulait pas. Il ne passait pas assez de moment avec ses parents pour réellement devenir un homme. Et ce n'était pas la femme au pair de chez lui, Hilda, qui allait lui permettre d'être un adulte parce qu'il ne le voulait tout simplement pas.
Une fois arrivé devant la grande demeure, il eut une lumière d'espoir quand son regard se posa sur la voiture de son père. Ca voulait dire que ses parents, qui travaillaient tous les deux pour la boîte de la famille qu'ils dirigeaient, étaient là. Un soulagement, puisqu'il ne voulait pas encore se vanter de quelque chose auprès de sa nounou. Il avait passé l'âge d'en avoir une, déjà. Mais elle, c'était différent. Hilda était dans la famille depuis sa naissance, elle vivait là, elle faisait la bouffe, le ménage.. Autant dire qu'elle était davantage une mère pour lui, de par ses actes et sa présence. Mais il ne pouvait pas oublier celle qui l'avait mis au monde, bien que ce ne soit pas facile tous les jours. Il faisait de son mieux pour que ça ne parte pas dans tous les sens, gardant la plupart des choses pour lui, se taisant sur les points qui ne lui convenaient pas, puisque de toute façon, en discuter n'allait pas servir à grand chose. Ca ne faisait que entraîner de grosses disputes, en plus du reste. Alors oui, le mieux était sans doute de ne pas trop y penser.
Lorsqu'il franchit la porte d'entrée, il croisa sa mère, se précipitant vers la voiture.
« J'ai une trop bonne nouvelle ! Tu te souviens du devoir de maths dont je t'avais parlé ?! ». Elle ne l'écoutait pas, trop absorbé par l'oreillette qu'il n'avait pas vu plutôt, elle alla même jusqu'à lui faire signe de se taire. Comble de l'ironie. Un soupir s'échappa de ses lèvres, si ça ne marchait pas avec elle, peut être que son père serait un peu plus conciliant. Il partit donc le trouver dans son bureau. Il semblait absorber par son boulot, lui aussi. Qu'ils soient à la maison ne voulait absolument pas dire qu'ils auraient deux minutes pour lui. Ce n'était.. Jamais le cas.
« Tu sais.. Le devoir de maths que j'ai eu.. » « Ecoute fiston, je n'ai vraiment pas le temps, on en parlera quand je rentrerais de mon voyage en Italie avec ta mère ». La conversation était close. William eut beau essayé une nouvelle fois de lancer le sujet du devoir, il ne prit que vent et mépris en pleine gueule. Il en avait assez.
Ses nerfs lâchaient, il étouffait, dans cette maison, avec tout ce mépris. Ils ne pensaient qu'au boulot, ils n'étaient jamais là, ils n'étaient jamais capable de l'écouter et lui, il se retrouvait toujours comme un con. A quoi bon faire un enfant, si c'était uniquement pour le laisser dans un coin hein ? A bout de nerfs, il froissa le devoir dont il était si fier et qui traînait encore dans ses mains. A quoi bon persister avec les études quand les parents eux-mêmes n'en avaient rien à cirer ?
« Maintenant que tu as fini le lycée, tu vas pouvoir commencer à apprendre le boulot de l'entreprise de la famille ». Son père était bien droit, un sourire sur les lèvres, il avait hâte de voir son fils le suivre. Sauf que ce n'était pas ce que son dernier voulait, ça changeait considérablement la donne, bien sûr. Il n'avait pas encore de projet d'avenir, ou en tout cas, très peu. Il venait d'obtenir son diplôme et même s'il avait postulé pour plusieurs université, il ne savait pas laquelle fréquenter. Mais il ne voulait absolument pas rentrer dans cette entreprise qui lui avait pourri la vie depuis qu'il était gamin.
« Je ne veux pas reprendre le flambeau de cette entreprise ». Les mots venaient juste de quitter sa bouche et ses parents semblaient totalement sous le choc. Forcément, ils ne connaissaient pas leur enfant et ils étaient encore persuadés qu'il allait vouloir suivre son mouvement, et c'était bien là la toute dernière chose qu'il voulait. Hors de question, même. Il voulait se construire un avenir, il n'avait pas besoin d'avoir autant d'argent que eux, il n'en avait pas la motivation et, de toute façon, ça n'avait pas apporté le bonheur dans cette maison. Ca n'avait donc aucun intérêt. Un soupir s'échappa de ses lèvres, alors qu'il baissait les yeux sous les regards déçus de ses parents. Il se sentait de trop et surtout, il voyait bien qu'il les avait totalement déçus. Mais il n'allait pas faire des projets de carrière sur quelque chose qui ne l'intéressait pas hein.
« Je sais que c'est ce que vous voulez depuis que je suis gosse. Peut être que je changerais d'avis mais vous n'avez jamais été là pour moi. Vous n'avez pensé qu'à votre job de merde. Je déteste Livingston & co. Je ne vous connais même pas ». Son regard était froid, distant et il ne voulait pas continuer cette conversation ridicule.
« Tu ne sais pas ce que tu dis ». Sauf que justement, il savait très bien ce qu'il disait et il était hors de question pour lui de le nier. Il ne reprendrait pas le flambeau.
« Si tu ne reprends pas l'entreprise familiale, tu n'es plus mon fils ». Triste, déçu et incapable d'ajouter le moindre mot, William lui tourna le dos et partit dans sa chambre. De toute façon, il n'avait jamais vraiment été son fils.
William avait grandi. Lorsque son père lui avait dit qu'il ne serait pas son fils s'il ne reprenait pas le flambeau, il avait décidé que cet homme ne serait plus son père. Du haut de ses dix-huit ans, il refusa de céder à un tel chantage affectif. Il n'était pas un abruti, il était même bien plus intelligent que certains. Pour preuve, il fit en sorte de conserver l'argent qu'il y avait sur son compte en le transférant sur un autre compte. Son père n'en sut jamais rien ou en tout cas, il ne chercha jamais à le lui prendre. C'était sans doute ça qui se trouvait être le plus important, d'une certaine manière. Un soupir s'échappa des lèvres du jeune homme alors qu'il écrasait sa cigarette. Il n'avait pas parlé à son père depuis deux ans, il ne voyait sa mère que peu souvent. Il avait vingt-cinq ans maintenant et il ne supportait pas qu'on lui fasse la leçon d'une quelconque façon que ce soit. Il avait changé, et il s'en était rendu compte bien vite. Après la réflexion de son père, il était devenu quelqu'un d'autre, une personne bien étrange aussi, d'ailleurs. Froid, distant et chiant, il se battait pour un rien, il énervait les gens et il avait perdu un bon paquet de ses amis du lycée. Lorsqu'il avait eu son diplôme, il n'avait pas été à la fac, il n'avait rien fait. Et à l'heure actuelle, il ne faisait rien, il n'en avait pas envie et il n'en avait même pas les besoins. Il avait suffisamment sur son compte pour vivre sa vie, s'il ne claquait pas tout en voiture. Il ne faisait pas particulièrement attention, mais il ne claquait pas tout en voiture. Il avait un appartement assez simple et il était tranquille. Il était devenu un gros con, de toute façon. On ne l'invitait pas vraiment pour les soirées ou les sorties. William n'est plus celui qu'il a été. Il est devenu un salaud, un abruti et un connard. Il a grandi, sans parent